Pourquoi Marie Madeleine ne saisit pas que Jésus puisse être ressuscité comme Jean l’avait compris en voyant les bandelettes ? Elle réalise qu’il n’y a plus rien qui puisse la consoler, si ce n’est un tombeau vide avec des linges dont elle ne comprend pas encore la symbolique. Madeleine se retrouve complètement dépouillée, déroutée, elle n’a plus de prise sur rien et « l’esseulement » qui l’envahit la plonge dans une désespérance abyssale. Madeleine agonise dans ses larmes… C’est alors que le Ressuscité s’approche d’elle sans qu’elle ne le reconnaisse. D’abord : « Femme, pourquoi… ? » Un mot qui, pour elle, ne porte pas de mémoire importante… Ça ne l’éveille pas, ni même ne la touche, et elle répond n’importe quoi : « si c’est toi qui l’as pris… » – sans même regarder. Puis de nouveau la voix. La voix du ressuscité se fait entendre « Marie ». Aussitôt, elle le reconnaît : « Rabbouni ! » (Mon maître) et elle veut se jeter aux pieds de Jésus. Elle ne réalise pas qu’elle est en train de vivre une résurrection, qu’elle est en train de sortir de son abîme de ténèbres, de noirceur et de désespérance ! Elle revient à la lumière. Elle est en train, analogiquement parlant, de ressusciter et naître de nouveau ; et on voit l’immense joie relevant la femme déterminée. Elle est venue d’elle-même au tombeau et à travers cela se profile la personnalité intense et libre qu’elle peut avoir. Elle vit une expérience inédite. Elle est la première à entendre la voix du ressuscité qui l’appelle par son prénom. Elle est la première à vivre la rencontre avec le Ressuscité qui d’emblée la relève. Jésus aurait pu apparaître aux apôtres, il n’avait pas besoin de Madeleine pour s’annoncer vivant… dira-t-on. Non, il n’y avait pas d’autre personne qui pouvait aller annoncer la résurrection de Jésus aux apôtres sinon Madeleine. 

Qu’est-ce que Madeleine a de plus que les apôtres ?

Elle a cette expérience du ressuscité qui les devance. Elle est la première à avoir entendu pour elle la voix du ressuscité et qui l’a vu. Elle est la première qui fait l’expérience du « relèvement », tout d’un coup. Son cœur qui était mort, cassé et désespéré est remis à neuf. Immédiatement, Madeleine reçoit la première mission du Christ ressuscité : celle d’annoncer la résurrection du Christ, en s’appuyant sur sa propre expérience d’avoir été elle-même relevée. Elle peut leur raconter ce qui s’est passé : « je l’ai vu mort à la croix et je l’ai vu ressuscité près du tombeau vide, il a dit mon nom, je l’ai entendu, il m’a appelé, j’ai entendu sa voix « vivante » après l’avoir vu se vider de son sang, il est vivant ! » Désormais Madeleine partage la vie nouvelle qui l’anime et c’est cela qu’elle a communiqué et transmis aux apôtres… Elle a vécu une rencontre personnelle et privilégiée avec le Christ que l’Évangile selon saint Jean a su bien relater. Et c’est une des raisons, sinon la raison pour laquelle Marie-Madeleine a été choisie par Jésus pour être l’Apôtre des apôtres. 

Je m’appelle Madeleine. Et Marie-Madeleine est vraiment ma patronne dans le sens où, grâce à elle, je fais moi-même cette expérience de la rencontre avec le Christ ressuscité, qui me donne sa merveilleuse joie. Évidemment, ça n’a pas la même intensité. Bien que je me reconnaisse d’une certaine manière dans Marie-Madeleine, j’ai ma perception personnelle. Je reconnais en elle une guide, une mère spirituelle, et je suis sûre que malgré le fait que rien de plus sur elle n’est mentionné dans les écrits reconnus, elle a eu une grande influence sur les apôtres. La mission de Marie-Madeleine s’est accomplie à ce niveau : être l’Apôtre des apôtres. 

C’était en soi déjà immense que ce soit elle qui ait annoncé, la première, la Résurrection de Jésus Christ ; et ses yeux étaient devenus des yeux qui percent la nuit… c’est cela qu’elle m’a appris au fil du temps : la « Résurrection Illico ».

Madeleine Delisle, amie des fraternités à Montréal