Le veilleur sur la ville n’est pas un étranger dans la ville. Il est de la ville. Il est avec les citadins, l’un d’eux, entrelaçant sa vie avec eux, qui comme lui, arpentent les rues et les places, chercheurs de vérité, quêteurs de sens.
Le veilleur sur la ville pleure avec la ville, meurtri de ses blessures, de ses erreurs, de ses violences, de ses peurs aussi et il chante avec elle lors des mains tendues, des sourires partagés, lorsque le blessé est secouru et le prisonnier visité, lorsque le migrant est accueilli et respecté ; il voit la bonté de Dieu sur la terre des vivants.
Solidaire, en tout, des hommes et femmes de la ville, avec eux il s’égare en cette terre étrangère, pourtant si familière – trop familière – du mal et du péché. Mais les peines et la souffrance de cette vie révèlent au veilleur, une soif plus grande, que le monde ne peut satisfaire.
Le veilleur sur la ville est de la ville mais ne lui appartient pas. Ses racines sont ailleurs. Il se sait pèlerin, seulement de passage ici. Il se tient sur son rempart qui est chemin de crête. Présent et ancré dans le réel de chaque aujourd’hui, il est aussi tendu vers un à venir, un adventus. ‘Son âme a soif de Dieu. Quand pourrais-je voir la Face de Dieu ?’
L’amour dont le veilleur se sait aimé et dont la ville est aimée pareillement, le tient éveillé sur son rempart. Vigilant. Pour la ville, il veut bien plus que des espoirs, lui partager une espérance qui ne déçoit pas. Il désire pour elle bien davantage que des biens périssables, lui annoncer le Bien éternel qui est un Visage, qui est un amour, qui est l’Amour véritable.
Alors il scrute inlassablement, non pas au loin mais au plus profond de son cœur, dans le secret de la prière, pour entendre dans le fin silence de l’Esprit le murmure, parfois à peine audible, souvent brouillé qui monte de la ville : ‘Veilleur, vois-tu se lever le Jour sans déclin. Entends-tu les pas du Bien-Aimé qui vient, enfin ?… Fera-t-il de moi SA VILLE-JOIE ?’
Soeur Carla de la fraternité de Montréal