Spontanément, le psaume 94 me vient à l’esprit : « Venez, crions de Joie pour le Seigneur ! Acclamons le Rocher qui nous sauve ! »

C’est le premier psaume que nous chantons le matin aux Laudes, dès que nous nous levons. « Venez, crions de Joie pour le Seigneur ! » On l’appelle invitatoire, et pour cause. Lorsque je le chante, je pense à la ville, au quartier, à mes collègues, à tous ces gens à qui j’aimerais dire, dans mes journées, à quel point Dieu les aime, à quel point Il est présent dans leur vie. Si l’occasion ne m’est pas souvent offerte de le leur dire avec mes mots, alors à ce moment-là de ma journée, je le leur chante de tout mon cœur : « Oui, c’est Lui notre Dieu, et nous le troupeau que mène sa main ! » « Chantez ! Chantez-le pour le faire savoir ! » renchérit le psaume 46. Et je leur crie au fond de moi : « Venez ! Entrez … ! » Et j’aime alors penser que rien ne peut arrêter la course puissante de ce chant liturgique …

En ce moment, je découvre également à quel point ce chant de reconnaissance à Dieu est un acte qui fonde notre communauté. Lors de l’office de la Résurrection le dimanche, ou bien aux jours de fête, l’invitatoire revêt un caractère plus solennel et c’est tous ensemble que nous le chantons, nous entraînant mutuellement dans cette joie toute matinale. C’est donc ensemble que nous décidons de fonder notre joie en Lui, de faire à nouveau alliance avec Lui, notre Sauveur, de nous laisser conduire par Lui. Chaque jour. Toute notre vie est là. Ce n’est pas rien quand on y pense … 
Oh, nous sommes encore bien endormis souvent, et la journée passe, avec son lot d’évènements 

tristes ou heureux qui, pour ma part, me font vite oublier que j’avais placé ma joie en Lui seul le matin même ! « Que ma langue s’attache à mon palais, si je ne place Jérusalem au plus haut de ma Joie … », chantons-nous pourtant dans le psaume 136. Mais j’espère malgré tout, et fermement, que jour après jour, ce psaume me façonne et transfigure patiemment mes lenteurs de cœur, pour tourner mon regard vers Dieu seul, tout en tous. Et pas seulement moi, mais avec tous mes frères et sœurs ! Je crois, oui vraiment, que peu à peu, en chantant matin après matin que Dieu seul est notre joie, nous devenons « ensemble moines et moniales au plus profond de notre cœur » (Livre de Vie de Jérusalem, §50) et Dieu en est heureux … ! Alors vive le chant !

Soeur Philomène (Fraternité de Paris)