Sommes-nous vraiment persuadés que, depuis notre baptême, nous sommes tous prêtres ? Comprenons-nous que le sacerdoce ministériel et le sacerdoce commun sont inséparables et n’ont de sens que l’un par l’autre ? Savons-nous assez que l’eucharistie n’est pas seulement un moment de notre journée ou de notre semaine, mais qu’elle englobe toute notre vie, et que notre existence est la matière même de ce qui est « eucharistié » au moment où nous célébrons sacramentellement le mystère de la mort et de la résurrection du Christ ?
Soyons francs, nous n’y pensons pas trop et la réponse à toutes ces questions pourrait être pour une bonne part d’entre nous plutôt négative. L’idée même du sacerdoce baptismal est peu présente à l’esprit des fidèles.
Pourquoi ? Peut-être parce que nous avons trop coupé notre vie sacramentelle de la vie de tous les jours et c’est dans la vie de tous les jours que le baptisé est appelé à être prêtre.
Nous le savons plus ou moins vaguement, les « sacerdoces », il y en a trois. Ou plutôt il n’y en a qu’un ! La lettre aux Hébreux le dit clairement : Le seul Prêtre, c’est le Christ. Si un seul est vraiment Prêtre, alors les autres ne le sont pas ou bien les autres le sont tous avec lui.
Unis au Christ, les baptisés deviennent capables d’accomplir leur vocation de médiateurs de l’unique don que Dieu veut communiquer aux hommes et qui contient tous les autres : son amour. La source et le sommet de ce don et ainsi de la vocation universelle au sacerdoce se trouve dans l’Eucharistie.
Soulignons deux aspects du sacrifice eucharistique : premièrement l’aspect du don de soi jusqu’à mourir par amour (cela peut se vivre au quotidien, tout au long d’une vie) ; deuxièmement l’aspect de consacrer, de rendre saint ce qui est vécu. Le sacerdoce ministériel, dit le Concile Vatican II, accomplit le sacrifice eucharistique en représentant du Christ et l’offre à Dieu au nom de tout le peuple (LG 10). Les baptisés sont appelés à apporter dans monde ce qui se vit dans l’Eucharistie, et dans le même mouvement à apporter à l’Eucharistie le monde et tout ce qui s’y vit. Le sacrifice offert par les prêtres ordonnés resterait inefficace si le sacerdoce commun des baptisés ne consacrait à Dieu le monde même et cela par toutes leurs œuvres, prières et initiatives apostoliques, la vie conjugale, la vie de famille, le travail journalier, les délassements corporel et spirituel, s’ils sont vécus dans l’Esprit, et même les ennuis de la vie, s’ils sont supportés avec patience (LG 34). Tout cela, uni à l’Eucharistie, permet à celle-ci d’atteindre les limites du monde, de pénétrer les existences et les réalités les plus ordinaires aussi bien que celles qui nous échappent et nous dépassent. La Parole qui retentit déborde ainsi largement l’espace de l’Église. Le sacerdoce commun permet aux baptisés de réaliser dans le monde profane ce que la liturgie proclame et promet dans l’espace sacré.
Jésus dit à ses disciples : Je suis la porte. Si quelqu’un entre par moi sera sauvé ; il entrera et sortira, et trouvera un pâturage (Jn 10,9). Comme baptisés nous vivons dans le monde sans être du monde, nous entrons pour sortir, nous sortons pour rentrer et ainsi de suite. L’Eucharistie nous suit et fait de nous des prêtres là où nous sommes.
Soeur Faustyna
Fraternité de Vézelay